2009 - André Téchiné
Jeanne habite seule avec sa mère. Un jour, alors qu'elle prospecte pour
trouver du travail, elle fait la connaissance de Franck. Rapidement, ils
s'installent ensemble dans une maison en tant que gardiens le temps de l'absence
du propriétaire. Tout se passait pour le mieux jusqu'à ce que Franck soit
poignardé : le magasin d'informatique juxtaposé à la maison était une couverture
pour faire passer de la drogue et Franck était au courant.
Ce drame va
profondément marquer Jeanne : son petit ami a failli mourir et va aller en
prison, et elle n'arrive pas trouver du travail. Pour des raisons
inexpliquées, Jeanne va inventer l'histoire d'une agression dans le RER qui n'a
jamais eu lieu.
Cette histoire est très librement inspirée de l'affaire de l'Agression du RER D de juillet
2004. Marie, une femme de 23 ans avait inventé une agression antisémite. Les
médias, le CRIF et les politiques se sont emballés dès qu'ils ont eu
connaissance de cette histoire. Ils confessaient leur indignation sur cet acte
antisémite, où une jeune femme s'est fait agresser par des jeunes de banlieue
alors qu'il n'y a rien eu.
Sans doute que la tentation du titre-choc du style "agression antissémite"
était trop grande. L'antisémitisme évoque toujours une époque qui fait ressurgir les vieux démons. Une dépêche AFP a suffi pour mettre
tout le monde sur le pied de guerre, même lorsque les policiers ont émis des
doutes sur l'histoire de Marie.
Qui est le plus à blâmer dans cette histoire ? Marie, certainement perturbée, qui ne s'attendait pas à
un tel engouement médiatique, mais surtout la presse, les
politiques et les associations de droits de l'Homme qui n'ont pas pris les
précautions d'attendre des éléments concrets venant des enquêteurs.
Ce que dit un des
personnages dans le film illustre l'affaire :"c'est eux [l'État] qui ont
fabriqué cette affaire du RER".
Une fois que cette affaire a été mise au clair, les médias se sont retrouvés
comme des couillons à devoir s'excuser, même s'ils l'avouaient qu'à demi-mot.
Ils essayaient de minimiser l'importance des effets de cet engouement massif sur
un mensonge en affirmant que "personne n'a été stigmatisé". Pourtant, les
soi-disant agresseurs étaient selon la description de Marie Leblanc d'origine
maghrébine et venaient des banlieues et les journaux en ont parlé.
La chanson
du rapeur musulman Médine sur cette affaire est le témoignage d'une personne qui
a eu le sentiment d'être méprisé dans ce merdier.
Téchiné a donc mis en scène cette affaire médiatique et honteuse. La première
heure est laborieuse, une vraie romance à l'eau de rose. Jeanne est naïve et
rencontre son prince charmant. Cela devient intéressant quand elle crée son
mensonge. Le réalisateur reste concentré sur Jeanne, paumée, et son entourage durant
l'emballement médiatique qui les dépasse tous.
En revanche, il a créé une
autre histoire. Les protagonistes sont différents, les situations changent un
peu, mais le fond est reste. On aperçoit même des extraits télévisés
d'époque.
Après les très bons Les Témoins et Les Egarés, ce nouveau film est en demi-teinte. Cependant, il nous rappelle cette histoire et du danger de l'aliénation des médias.