Paris, 2023. Une pyramide flotte au-dessus de la ville. À bord, les
Dieux Égyptiens qui qui exigent du pétrole pour leur engin spatial. La
négociation se fait avec le gouverneur Jean-Ferdinand Choublanc qui
dirige la ville autonome de Paris. Il est issu du parti fasciste qui
ambitionne de mener une guerre raciale. La Ville a déjà terminé son
processus de gentrification. Le centre pour les riches, la banlieue
pour les pauvres. C'est le même cas de figure qu'aujourd'hui en plus
prononcé. La banlieue est délaissée. Ses résidents sont juste bons à
travailler pour les industries en tant qu'ouvriers esclaves. Ils ne sont
pas capables d'aligner des phrases correctement, même les rédacteurs
de journaux clandestins sont quasi-analphabètes.
La négociation entre les Dieux et Choublanc est dans l'impasse. Ce
dernier demande, en échange du pétrole, à devenir immortel. Allant à
l'encontre de leur déontologie, les dieux refusent et attendent le
résultat des élections à venir. Étant en dictature, le résultat ne
laissait que peu de doutes, jusqu'à ce qu'Horus entre en dissidence
contre les lois divines. Le Dieu à tête de faucon veut intervenir dans
la farce électorale afin d'avoir un moyen de pression sur ses
congénères. Il va prendre possession du corps d'Alcide Nikopol,
déserteur durant la guerre contre les Russes de 1993 et les Chinois et
condamné à être envoyé dans l'espace en hibernation. Son engin va
revenir s'échouer sur terre peu avant les élections. La
coopération entre Nikopol et Horus va quelque peu modifier la kermesse
électorale.
Cette critique du totalitarisme et de la guerre froide (l'état du
monde de ce monde est la résultante de ce conflit qui aurait mal
tourné) fait indubitablement penser au 1984. Comme dans le roman
de Georges Orwell la dictature se passe dans un pays capitaliste qui sombre
dans la dictature après une catastrophe. Mais Bilal inclut de nombreux
éléments fantastiques avec les voyages spatiaux, la cohabitation
extraterrestre et les dieux grecs. Un peu à la manière d'un Terminator
(tous les deux ont été réalisés au début des années 80), il est
amusant de voir des dates déjà passées (1993) qui prévoyait un futur où
la technologie n'a dans la réalité pas eu cours.
Le graphisme est superbe avec des dessins détaillés et colorisés par
le dessinateur lui même. Une belle réussite même si la fin ronronne un
peu trop.
Cette bande dessinée regroupe les trois tomes de la série :
- La foire aux immortels (résumés plus haut)
- La femme piège (avec l'apparition de la beauté glaciale Jill Bioskop)
- Froid équateur (un dernier opus alambiqué qui s'essouffle)